26 sept. 2021

Journée mondiale du migrant et du réfugié

 Extrait de LA CALANQUE PERDUE

Page 9

Avant de venir vivre dans cette maison, il y avait eu la chaloupe. Elle avait navigué, avant d’arriver ici, avec une troupe de gens dont elle avait oublié les traits. Même son père et sa mère, n’avaient plus de visage, ils n’étaient plus que tendresses, caresses, soupirs…

Sa petite enfance, elle l’avait oubliée, tout avait basculé un soir de tempête. Les siens s’étaient embarqués dans une drôle de galère, poussés par le désir de vivre en paix .D’où venaient-ils ? Elle ne savait plus. Ils étaient partis voilà tout.

Leur terre ne leur appartenait plus, ne les nourrissait plus, un tyran s’était approprié leurs biens, allez savoir, si longtemps après 

Il suffit de prendre une poignée de sable dans sa main et de le laisser couler entre ses doigts, pour savoir ce qu’est la liberté. Elle devait avoir trois ou quatre ans à l’époque, pas plus.

Le bruit des vagues, avec leur reflux incessant ; les porte-voix des garde-côtes, les cris qui s’entrecroisent dans le noir, elle n’avait rien compris cette nuit là !


5 sept. 2021

C'est la rentrée

      L ' ECOLE 


L’école était au bord du monde,
L’école était au bord du temps.
Au dedans, c’était plein de rondes ;
Au dehors, plein de pigeons blancs.
On y racontait des histoires
Si merveilleuses qu’aujourd’hui,
Dès que je commence à y croire,
Je ne sais plus bien où j’en suis.
Des fleurs y grimpaient aux fenêtres
Comme on n’en trouve nulle part,                                                      
Et, dans la cour gonflée de hêtres,  
 Il pleuvait de l’or en miroirs.                                                          
Sur les tableaux d’un noir profond,
Voguaient de grandes majuscules
Où, de l’aube au soir, nous glissions
Vers de nouvelles péninsules.
L’école était au bord du monde,
L’école était au bord du temps.
Ah ! que n’y suis-je encore dedans
Pour voir, au dehors, les colombes.

Poème nostalgique de Maurice Carême 

(  1899 - 1978 )